Crédits sociaux en Tunisie : Réelle opportunité ou illusion financière

Les caisses sociales tunisiennes ont récemment annoncé le lancement d’une opération de crédits à taux préférentiels à destination de leurs membres, dans le but affirmé de soutenir le pouvoir d’achat des citoyens et de réduire le déficit budgétaire des caisses.

Cette annonce a déclenché un débat animé, reflétant une diversité d’opinions parmi les acteurs économiques et sociaux du pays. D’un côté, certains voient dans cette initiative une opportunité de dynamiser la consommation et de soulager les caisses sociales, tandis que de l’autre côté, des préoccupations émergent quant à une éventuelle concurrence avec le secteur bancaire et les pressions inflationnistes associées.

Un regard critique sur cette initiative est apporté par l’expert économique Mourad Hattab, qui souligne l’ampleur limitée de l’enveloppe budgétaire allouée par la CNSS et la CNRPS, représentant seulement 1% du volume total des crédits accordés par les banques. Ce constat remet en question l’idée d’une rivalité directe entre les caisses sociales et les institutions financières.

Hattab met également en avant le faible niveau de demande pour ces crédits, soulignant que seulement 200 requêtes sont reçues quotidiennement, ce qui est infime comparé à l’activité des agences bancaires. Cette observation suggère que les deux systèmes ne sont pas directement en concurrence.

Concernant les taux proposés, bien qu’ils soient avantageux en apparence, une analyse plus détaillée révèle une différence peu significative par rapport aux taux bancaires actuels. Une simulation réalisée par Hattab met en lumière cette subtilité, montrant une différence de 1 800 Tnd sur un prêt de 25 000 Tnd sur 3 ans entre les intérêts payés aux caisses sociales et ceux payés aux banques.

Cependant, des défis subsistent quant à l’accessibilité de ces crédits pour certains segments de la population, notamment les fonctionnaires dont les charges de remboursement sont plafonnées. Avec un salaire moyen d’environ 1800 Tnd brut, un prêt de 50 000 Tnd sur 5 ans impliquerait un remboursement mensuel de 1062 Tnd, dépassant la capacité maximale de remboursement fixée à 700 dinars pour ces fonctionnaires.

La fragilité financière des caisses sociales soulève des inquiétudes quant à la pertinence de cette initiative. Avec un déficit de 2.8 milliards de dinars en 2022 et des fonds propres négatifs de 3.377 milliards de dinars, une évaluation approfondie de la stabilité financière est nécessaire avant de poursuivre de telles actions.

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